mercredi 29 mars 2017

Livre de Francois Cheng, Shitao, 1642-1707 : La Saveur du monde



Près de deux siècles avant Baudelaire, le moine-peintre Shitao (1642-1707) invente au fil du pinceau une conception totalement "moderne" du geste de peindre; et, entre deux tableaux, expose celle-ci avec des mots inspirés dans un traité fameux : les Propos sur la peinture du moine Citrouille-amère.
François Cheng, qui a déjà révélé au public occidental la figure majeure d'un autre maître chinois (Chu Ta : le génie du trait, Phébus, 1986), nous convie ici à découvrir une centaine des peintures parmi les plus représentatives de la manière de Shitao, la plupart en provenance des musées de Chine - donc quasi inconnues en Occident.



Il retrace pour nous l'itinéraire spirituel d'un artiste à la vie des plus mouvementées, qui sut trouver sur la fin, dans une haute solitude paradoxalement ouverte à tous les possibles, la résolution des contradictions qui l'habitaient.

" Par sa virtuosité inquiète, jamais satisfaite d'elle-même, écrit François Cheng, Shitao a enrichi comme aucun autre l'art du trait : ses coups de pinceau sont célèbres par leur vivacité, leur audace, mais surtout leur stupéfiante variété. Son esprit d'invention, sa hardiesse toujours en alerte ont littéralement brisé le moule de la composition classique ; il n'a de cesse d'introduire dans ses tableaux, par tout un jeu de vides intermédiaires, d'agencements obliques, de contrastes inattendus, de déformations voulues, une sorte de " précarité dynamique ", de magie fragile qu'il n'est pas exagéré de qualifier de musicale. " " Révolutionnaire " dans l'âme et malgré cela profondément attaché à la plus antique tradition, Shitao a toujours rêvé de solliciter non seulement le regard mais tous les sens qui, chez l'homme, participent au banquet du Réel. Pour lui, c'est à ce prix seulement que nous avons chance d'approcher le mystère des choses, de goûter " la saveur du monde ". Ainsi résume-t-il l'alchimie sensorielle qui, selon lui, gouverne toute représentation : " Je parle avec ma main, tu écoutes avec tes yeux. "
'' Un livre admirable'' Philippe Sollers

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